Guerre et paix

Il y a un siècle finissait la Première Guerre mondiale. Plutôt que de célébrer la victoire, on a cette année célébré la paix. C’est déjà un progrès, mais un progrès seulement, la victoire de 1918 n’ayant débouché que sur des traités qui n’ont pas garanti la paix. La paix ne se limite pas à l’arrêt des hostilités. Elle peut être une perspective pour un monde autre fondé sur des projets communs, des rencontres, le respect des différences… Mais la paix rêvée par tous n’est pas simple à mettre en place, car celle qui est la mienne ne correspond pas spécialement à celle que souhaite mon adversaire… Délicate à mettre en place, est-elle impossible ? toujours fragile ?

Dans les années 60, Gaston Bouthoul avait fondé l’institut de polémologie (étude de la guerre). L’une de ses premières observations fut que la guerre n’a jamais cessé depuis que l’Histoire existe. Toujours un conflit ici ou là, plus ou moins important, allant de quelques morts à des millions de décès (Guerre de Trente ans, invasions mongoles, guerres franco-allemandes, colonisations et décolonisations…). Les destructions sont toujours importantes et la violence toujours présente et sans limite. Ainsi en va-t-il du viol des femmes comme arme de guerre. Ce ne sont plus désormais des armées qu’il faut vaincre, mais aussi des populations qu’on veut détruire… On sait que la der des ders n’existe pas. Aujourd’hui plusieurs dizaines de pays sont en guerre plus ou moins larvée, et l’effort de déminage handicape les autres.

Impérialisme, guerre défensive ou préventive, guerre sainte, invasions diverses, « partage » des richesses et des ressources rares… Compte tenu des mensonges, des manipulations, des intérêts privés, des trahisons, d’une manière ou d’une autre on se retrouve, avec la guerre, face au problème du Mal.

La peur est une explication : peur d’être pillé, de voir sa famille en danger, peur de manquer, d’où la nécessité de se défendre au risque de l’escalade. L’orgueil peut aussi expliquer la guerre : penser faire partie de l’élite alimente la volonté de dominer. Être sûr de ses opinions, penser avoir la vérité et vivre les vraies valeurs de l’humain, peuvent « justifier » des guerres comme les guerres coloniales par exemple.

La guerre, c’est aussi l’héroïsme, le dépassement de soi, l’altruisme. C’est aussi la fraternité comme dans les tranchées en 14-18. C’est la rencontre de l’autre, car l’armée et les guerres brassent les peuples. Mais n’y a-t-il pas aussi la fin des interdits ? Car tout devient possible : on peut tout casser, voler, piller (les musées sont pleins de prises de guerre). On joue aussi avec la mort. Toutes ces explications ne sont pas suffisantes et les réponses de l’Histoire, de leur côté, semblent bien inutiles. Le problème demeure : pourquoi l’Homme véhicule-t-il tant de haine et de violence ? Lui qui est capable d’amour, de culture, de beauté ! Le mal absolu qu’est la guerre demeure en fin de compte un « pourquoi » sans réponse et il ne nous reste plus qu’à rester vigilants pour maintenir la paix.

Vincens Hubac

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