VERS QUEL INCONNU ?

Le 6 janvier, ou lors du deuxième dimanche de janvier, nous fêtons l’Épiphanie, aussi appelée Théophanie chez les orthodoxes, ce qui signifie « manifestation de Dieu », et qui nous rappelle le sens premier de cette fête : se réjouir de la manifestation du Seigneur au monde, en particulier par son incarnation dans un être humain, ce tout petit enfant dont nous fêtons l’arrivée. 

Au fil des siècles, cette fête est devenue « le jour des rois », marquant la visite des « rois mages », ces énigmatiques voyageurs auxquels les traditions successives ont donné corps, en leur attribuant le titre de rois, puis les mettant au nombre de trois, enfin les nommant et les figurant avec une couleur de peau précise. 

Dans l’évangile de Matthieu (Matthieu 2, 1-12), le seul des quatre qui parle de ces visiteurs venus de loin, ils sont seulement cités comme μάγοι, « des mages », ce qui peut représenter des magiciens, des sorciers, des prêtres interprètes des songes… Ou encore le mot est tiré d’un nom propre, désignant une des six tribus qui ont formé la nation des Mèdes, auquel cas ce qualificatif ne désignerait que leur nationalité. Tout ce que l’on nous dit, c’est que ces voyageurs viennent de loin, de l’Est, qu’ils sont guidés par une étoile plus marquante que les autres, et qu’ils apportent des cadeaux de valeur, des cadeaux destinés habituellement à des personnalités royales. Ils viennent de l’inconnu, y repartent, et sont signalés dans les textes, car ils marquent leur reconnaissance de Dieu fait homme par leurs cadeaux. 

Cette année 2020 a plongé le monde entier dans l’inconnu. Un virus aux atteintes plus fortes que les autres nous a montré que l’espèce humaine ne maîtrisait pas l’ensemble des écosystèmes, que malgré les avancées techniques, nous sommes encore bien loin d’être égaux de Dieu. Nous avons dû avancer, pas après pas, vers une destination incertaine, sans aucune connaissance du terrain. Comme les mages, nous avons dû trouver un guide, une étoile, une Espérance. Comme les mages, nous avons sans doute affronté les déserts, les doutes, la fatigue, l’épuisement. 

Comme les mages, trouverons-nous notre destination ? Saurons-nous mettre notre confiance dans ce tout-petit, serons-nous capables de nous émerveiller encore ? Où nous mènera l’étoile ? 

Arthur Gerstlé-Joly